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Grèves d'avril, mai, juin 2003...
 
Mardi 10 juin, Déclaration intersyndicale nationale...
 

Lettre aux parents d'élèves et aux citoyens inquiets, indécis ou en colère...
 
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" La grève reconductible est-elle trop politisée ? Mettre le chaos dans le pays revient-il à prendre les enfants , les usagers, les citoyens en otage ? "

Qui met le chaos dans le pays ?

Peut-on qualifier de responsable un gouvernement incapable de tenir compte d'un mouvement social massif et populaire ? Il tente de minimiser le conflit en donnant des consignes aux préfets et aux médias pour trafiquer le nombre de manifestants et de grévistes. Il veut casser les grèves, non-violentes, par des intimidations sous forme de violences policières, de plus en plus fréquentes. Il divise les syndicats et les grévistes par des négociations " privées ". Il joue avec le temps en misant sur les vacances d'été pour passer ses projets en force à l'Assemblée Nationale.

C'est le gouvernement qui prend le pays en otage, niant toute citoyenneté en voulant imposer son idéologie libérale.

Que signifient les projets du gouvernement ?

La plupart des médias nous empêchent de prendre du recul. Le gouvernement n'agit pas seul. Il existe bien une volonté mondiale de casser ce qui reste de services publics. Il s'agit d'offrir au privé et donc aux dividendes des actionnaires l'éducation, la recherche, la culture, les retraites, la santé, le social … Il s'agit de réduire l'Etat à ses fonctions régaliennes répressives (armée-police-justice), de décentraliser pour déréglementer et en finir avec les acquis sociaux.

Des générations entières se sont battues, avec courage et dignité, parfois au péril de la vie, pour rendre cette vie plus juste, plus humaine. C'est cette solidarité-là que les gouvernements veulent détruire. Pour les retraites par exemple, peut-on accepter que l'allongement de la vie se traduise en régression sociale (travailler plus longtemps pour une retraite plus petite) ?

Quelles en seraient les conséquences ?

Au lieu d'améliorer les services publics au profit des usagers, seuls les intérêts financiers des actionnaires de ces services privatisés seraient désormais pris en compte. Tout deviendrait monnayable : l'éducation, la solidarité, l'art, la science et la sagesse …

Conséquences immédiates : des systèmes à deux vitesses, pour les riches et pour les pauvres ; des inégalités sociales et territoriales ; une précarisation croissante de la société ; la répression comme négociation sociale.

Conséquences à plus long terme : à cette précarisation des sociétés riches comme la nôtre correspondrait une faillite des Etats pauvres en Afrique, en Amérique latine et en Asie. En effet, l'aboutissement de la politique du FMI, de la Banque Mondiale et les accords de l'OMC conduisent et conduiraient ces Etats à abandonner leurs efforts d'éducation et de santé, à ruiner leur agriculture vivrière, à déposséder leur population de savoirs agricoles synonymes de survie. D'où des risques majeurs de conflits, une militarisation extrême de la société, une atteinte irréversible à l'environnement de la planète.

Accepter les projets Chirac-Raffarin c'est ouvrir, cette fois beaucoup plus vite, cette boîte de Pandore.

L'exemple de l'Education

Peut-on accepter comme avenir : des classes à 35, la fin de l'aide aux enfants en difficulté, la fin de l'école maternelle, la fin des aide-éducateurs et des surveillants, la fin des missions de santé, d'aide sociale et d'orientation dans les établissements scolaires, la fin de la formation continue des enseignants, la fin des projets culturels, la course au rendement scolaire, la concurrence entre écoles, entre collèges et lycées aux moyens de plus en plus inégaux, l'ingérence des élus dans la pédagogie avec le contrôle des crédits et de la carte scolaire, la soumission de la formation aux besoins économiques locaux immédiats ? (liste non exhaustive, car ce n'est qu'un début …)

Les syndicats et les grévistes sont-ils irresponsables ?

L'exemple des retraites
Le discours économique dominant consiste à vouloir faire porter l'effort sur les seuls salariés et précaires et à qualifier le mouvement social de démagogue. Or des propositions très sérieuses, chiffrées, existent pour financer les retraites sans régression sociale. La retraite pour tous à 37,5 annuités sans augmentation de cotisations salariales, c'est tout à fait réaliste. Il suffit de lire les tracts syndicaux ou des journaux comme Politis, Alternatives Economiques, Le Monde Diplomatique ou bien d'autres, qui fourmillent de propositions sérieuses.
L'utilisation des richesses du pays est un choix politique.

Syndicats et grève générale
Dans l'enseignement, on peut regretter la multiplication des grèves d'un jour, inefficaces, d'octobre à avril, et le retard des confédérations syndicales par rapport à la base pour lancer la grève reconductible. On peut regretter la lenteur des confédérations interprofessionnelles pour s'engager dans la grève générale alors que la base exprime depuis longtemps sa solidarité avec le mouvement enseignant. Une action générale plus précoce, synchronisée et courte aurait sans doute été plus efficace, en terme de rapport de forces, que ces hésitations qui pénalisent le mouvement.

Y a-t-il d'autres moyens que la grève ?
Actuellement non. Ce mouvement a pris des proportions inédites. Même les personnels de direction des établissements secondaires et les inspecteurs de l'Education Nationale expriment au minimum leurs critiques vis à vis du gouvernement.
Stopper le mouvement, ce serait nous retrouver en septembre avec les lois de régression votées. Pourrions-nous alors repartir au travail, défaits, tête basse, en rejetant nos valeurs humanistes ?

Il nous faut maintenant aller jusqu'au bout, en créant le rapport de force décisif, pour obtenir l'abandon des projets gouvernementaux. Il faut imposer des négociations sociales pour répondre aux besoins de la société et non aux délires des actionnaires. Il faut mettre en œuvre de nouvelles formes de démocratie participative et une culture de négociation, afin que de tels conflits puissent être traités en amont, sans les lourdes conséquences que nous connaissons : perturbation de la fin de l'année scolaire et des examens, perturbations familiales et économiques, sacrifices de nombreuses journées de salaire des grévistes.

Afin de ne pas pénaliser les élèves et les étudiants, il est tout à fait possible et il serait raisonnable de reporter la rentrée scolaire de septembre, le temps de faire passer les examens, d'orienter et de répartir les jeunes. Que signifierait la tenue d'examens dans le contexte actuel, avec une telle proportion de grévistes, avec le stress et les inégalités qui touchent élèves et étudiants ? Des examens reportés devraient en outre voir les jurys tenir compte des conditions exceptionnelles de passage, en valorisant l'évaluation continue.

C'est le gouvernement qui, par son aveuglement et son obstination, prend le pays en otage.
Le seul choix qui s'offre à nous, c'est se résigner ou poursuivre le mouvement pour gagner et pour construire de nouvelles formes d'engagement citoyen.
Quel monde voulons-nous offrir à nos enfants ?


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